Page:Dodge Stahl - Les Patins d argent.djvu/105

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Il est vrai que Jacob Poot s’était montré un peu court d’haleine pendant les derniers milles parcourus et qu’il n’eût pas été fâché de refaire un somme ; cependant il y avait encore en lui assez de jovialité pour en fournir à une douzaine d’écoliers. Karl Schummel lui-même, qui était devenu très-intime avec Ludwig pendant la route, en oubliait d’être désagréable. Quant à Peter, il était le plus heureux d’entre les heureux. Il avait chanté et sifflé si joyeusement tout en patinant, que les passants les plus graves n’avaient pu s’empêcher de sourire en l’écoutant.

« Allons, camarades, c’est bientôt l’heure de déjeuner, dit-il en s’approchant d’un café situé dans la rue principale. Il nous faut quelque chose de plus substantiel que le pain d’épice de la jolie fille. »

Il plongea les mains dans ses poches comme pour dire :

« Il y a assez d’argent ici pour nourrir une armée entière.

— Ho ! ho ! s’écria Lambert, qu’est-ce qu’il a donc ? »

Peter, devenu subitement pâle et les yeux démesurément ouverts, se palpait les côtes et la poitrine, de l’air d’un homme dont le cerveau aurait tout d’un coup déménagé.

« Il est malade ! s’écria Ben.

— Non, il a perdu quelque chose, dit Karl. »

Peter ouvrit la bouche comme une carpe hors de l’eau.

« Ma bourse de cuir, notre bourse à tous, avec tout notre argent, a disparu, parvint-il à dire. »

Nos jeunes voyageurs restèrent un instant immobiles et comme pétrifiés ! Ils étaient trop saisis pour parler.

« C’était insensé, s’écria enfin Karl rudement. Quelle folie de confier tous les fonds à un seul individu ! Je l’ai dit depuis le commencement. – Regardez dans votre autre poche, Peter…

— Je l’ai déjà fait ; la bourse n’y est pas !

— Déboutonnez votre jacquette de dessous. »

Peter obéit machinalement. Il ôta même son bonnet et