Page:Dodge Stahl - Les Patins d argent.djvu/310

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Vous vous rappellerez qu’un vrai Hollandais n’est en aucune circonstance sans sa pipe. Il peut, pendant un moment, oublier de respirer, mais s’il néglige sa pipe, c’est qu’il est à la mort. Or ce jour-là tout le monde était en vie. Des spirales, des nuages de fumée s’élevaient dans toutes les directions. Plus fantastique la fumée, plus calme et solennel était le visage du fumeur.

Regardez aussi ces garçons et ces filles montés sur des échasses. Ils voient par-dessus la tête des plus grands. Cela fait un effet étrange de voir ces petits corps bien haut perchés dans les airs et portés par des jambes invisibles.

Vous lirez dans certains livres que les Hollandais sont une nation éminemment paisible et silencieuse ; rien n’est plus vrai, mais les exceptions sont pour confirmer la règle. Écoutez. Avez-vous jamais entendu, sortant d’une multitude, une rumeur aussi étourdissante, aussi compacte ? Tout cela est fait de voix humaines. Je me trompe, les chevaux y aident un peu, ainsi que les violons qui s’essayent. Il paraît que cela leur fait du mal, aux violons, lorsqu’on les accorde ; quels grincements ! Toutefois, la masse de ces sons confus provient de la grande vox humana qui appartient à la foule.

Ce nain qui circule avec un panier et qui glisse si adroitement entre tous ces groupes contribue au tapage pour sa part ; on entend sa voix perçante crier par-dessus toutes : « Pipes et tabac ! Pipes et tabac ! »

Cet autre, son grand frère, quoique évidemment plus jeune de plusieurs années, annonce par des cris d’une autre sorte des bonbons en forme de noix, faits avec de la pâte et du sucre. Il engage sans vergogne les jolis enfants à accourir avant que sa provision, qu’il peut renouveler sans cesse, n’ait disparu.

Tout là-haut, dans ce pavillon construit sur les bords