Page:Doff - Jours de famine et de détresse, 1943.djvu/13

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VISION


Il neige ; j’ai la grippe ; sur la place, les gamins font des glissades. Je m’accoude à la fenêtre et contemple cette vie sur la neige. Sont-ils souples et lestes, ces enfants ! Grands et petits s’en donnent : ils glissent ; ils se poussent ; ils tombent en grappes.

Ah ! en voici un en loques, sale, la tête embroussaillée, les sabots trop grands, les bas troués, les genoux perçant le pantalon, le fond de culotte en lambeaux ; pâle, boursouflé, mais agile et râblé. Déjà de loin, il prend son élan et fait une glissade d’une douzaine de mètres. Dans cet élan qu’il ne parvient plus à maitriser, il en entraîne d’autres, il en renverse sur son chemin. Aucun n’a mal. Tous cependant se fâchent, se redressent,