Page:Doff - Jours de famine et de détresse, 1943.djvu/56

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nouvelle paroisse. Elle partit sans m’encourager ; mais, quelques instants après, le vicaire vint, cachant derrière sa soutane un rouleau de papier blanc. Il me demanda si je regrettais d’avoir manqué de respect à Dieu, et comme je répondais « Oui », il me donna l’image : un Saint Pierre avec les clés du ciel. J’aurais préféré une Ascension de la Vierge, pour les guirlandes de fleurs qui l’entouraient, mais enfin ceci était un prix que j’avais gagné.

À l’école, je n’en avais jamais eu, parce que j’étais très sale, toujours déchirée, et peu assidue. Nous devions continuellement déménager sous menace d’expulsion, à cause du loyer qu’on ne pouvait payer, et ma mère, négligente, attendait parfois six mois avant de faire la transcription d’une école à l’autre. Aussi étais-je toujours la dernière, comme du reste tous mes frères et sœurs. J’étais cependant capable d’apprendre ce qu’on aurait voulu, et j’avais des dons. Ma voix était si jolie qu’un des instituteurs ne manquait jamais de se mettre de mon côté, la tête penchée vers moi, quand on chantait en chœur. À la gymnastique, on faisait grimper aux échelles filles et garçons ; mais moi, qui étais souple comme un chat, je devais descendre dès le troisième échelon : l’instituteur de garde,