cela, il expédia une chaloupe, mais Dieu qui ne la voulait pas
perdre, lui envoya un vent contraire qui l’empêcha d’aller jusqu’au
blocus des Trois-Rivières, dont on avait aucune nouvelle à Kébecq,
et dont on avait rien su, sans qu’il fut découvert par les plus lestes
du pays, qui en ce même temps coururent après le Père Pounère
pour le délivrer d’entre les mains des Iroquois. Or ces messieurs,
revenant de cette course dont il est parlé dans les relations du
temps, ils trouvèrent la chaloupe, laquelle montait au Montréal,
qu’ils avertirent de descendre au plus tôt à cause de l’armée Iroqnuise
qu’ils avaient vue devant les Trois-Rivières, ce qui faisait
redon'ler les vœux pour l’arrivée de M. de Maison-Neufve, afin
d’aller dégager ces pauvres affligés, mais si Dieu ne voulut pas
accorder cet honneur, il voulut se servir en ceci du Montréal par
une voie bien différente. Il y avait lors plusieurs Hurons au
Montréal qui y faisaient la guerre aux Iroquois à l’abri de ce fort
entre autres, il y avait le plus brave de tous, nommé Anontaha.
qui avait fait voir un courage extraordinaire dans une action dont
nous parlerons ci après. Or ces Hurons, dans leurs découvertes
aperçurent un jour la piste des ennemis, lesquels venaient tâcher
de faire quelque méchant coup en ce lieu ; d’abord qu’ils eurent
eu cette connaissance, ils en vinrent donner avis, et incontinent les
Français et les Hurons formèrent deux partis du côté d’où venait
l’ennemi, qui se trouva enfermé entre les deux, où il leur fallut combattre en champ clos, il est vrai que les Iroquois vendirent bien
leur vie et leur liberté, car encore qu’ils fussent peu, c’étaient les
plus braves de leur nation, et que de plus, ils étaient favorisés d’un
grand embarras de bois, mais enfin en ayant été tué la majeure
partie, le reste fut contraint de se rendre à la force, hormis quelque :
uns qui se sauvèrent. Or tous les captifs ayant été amenés au
château, ils dirent qu’ils avaient une grosse armée qui ravageait
tout le pays d’en bas et y mettait tout en combustion. M. De
Musseaux[1] qui commandait, sachant ces choses, et que ses prisonniers étaient des considérables, il se conseilla avec les mieux censé
de ce qu’il y avait à faire. Le sentiment commun fut que M. Lemoine
persuaderait à Anontaha de s’en aller parlementer avec les Iroquois
et de sauver le pays, et s’il pouvait, nommément les Trois-Rivières
qu’on apprenait être en grand danger ; à cette proposition ce brave
sauvage se résolut d’exposer sa vie pour le bien du pays, il descendit dans un canot lestement équipé et entra dans les Trois-Rivières, après qu’il y fut, il proposa aux Iroquois de s’approcher
et de l’entendre, ensuite leur ayant donné le loisir de venir assez
- ↑ Il était neveu de M. Louis d’Aillebout.