Page:Dorat - Œuvres diverses, Neuchatel, 1775.djvu/124

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Imitez les langueurs de la douce mollesse :
N’allez point par des sauts fatiguer sa paresse.

Ici, nous séduisant par la vivacité,
Peignez dans votre essor un cœur plus agité.
Que vos bras jusqu’à nous toujours prêts à s’étendre,
Soient autant de filets où l’on cherche à se prendre.
Marquez tous les degrés de l’amoureux débat,
L’instant de la victoire et celui du combat,
Le calme du bonheur, le feu d’une caresse :
Fuyez, arrêtez-vous, suspendez votre ivresse.
Comme Guimard enfin appellez les desirs,
Et que vos pas brillans soient le vol des plaisirs.
C’est ainsi que Sallé, qui brilla sur la scene,
Émule des amours, en paroissoit la reine.
La tendre volupté présidoit à ses pas,
Animoit ses regards, et jouoit dans ses bras.
Comme elle cependant sur ces heureux mysteres
Laissez toujours tomber quelques gazes légeres ;
Et ne montrant jamais qu’un seul coin du tableau,
Laissez-nous soulever le reste du rideau.
Par des pas trop lascifs n’offensez point la vue :
Vénus même prescrit l’adroite retenue.
Enlacez-vous vos bras autour de votre amant ?
N’allez point, sans pudeur à nos yeux vous pâmant,
Outrager la décence, et sirene muette,
Proposer au public un bonheur qu’il rejette.