Page:Dorat - Œuvres diverses, Neuchatel, 1775.djvu/52

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Arbre, élevoit sa tige ; onde ou feu dévorant,
Pétilloit en phosphore, ou grondoit en torrent ;
Rouloit, tigre ou lion, sa prunelle enflammée,
Et soudain dans les airs s’exhaloit en fumée ;
Le vrai vous est caché sous cette allégorie,
J’y vois le grand acteur, qui toujours se varie,
Imite d’un héros l’élan impétueux,
Nous peint la politique et ses plis tortueux,
D’un tendre sentiment développe les charmes,
Là frémit de colere, ici verse des larmes,
Par un jeu séduisant échappe à ses censeurs,
Et gouverne à son gré l’ame des spectateurs.
Soit fable ou vérité, cette métamorphose
Indique les travaux que votre art vous impose,
Quels divers sentimens vous doivent animer,
Et sous combien d’aspects il faudra nous charmer.
L’étranger plus avide, en sujets plus sterile,
Vous appelle peut-être et vous offre un asyle.
Ah ! N’allez pas grossir, à la fleur de vos ans,
Le servile troupeau de ces bouffons errans,
Qu’adopte par ennui la province idolâtre,
Et qui de cour en cour promenent leur théatre.
Votre talent, qu’enfin on sait apprécier,
À Paris est un art, et là n’est qu’un métier.
Paris seul vous promet de rapides conquêtes,
Et pour vos jeunes fronts des palmes toujours prêtes.