Page:Dorat - Œuvres diverses, Neuchatel, 1775.djvu/86

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C’est ainsi que l’on voit les flexibles ciseaux
De l’arbre aux fruits dorés arrondir les rameaux.
Oeil rusé, taille leste et langues indiscrettes,
Ce qu’il faut aux valets, il le faut aux soubrettes.
Par l’organe sur-tout elles doivent briller,
Agir presque toujours, et toujours babiller ;
Ou du moins, se taisant avec impatience,
Par un geste indiscret échauffer leur silence.
Qu’elles se gardent bien de charger leurs tableaux ;
Nous voulons des Teniers, et non pas des Calots.
Le vain effort de l’art annonce une ame aride.
Alors qu’il est contraint, le rire est insipide.
Camille, aux yeux charmés de zéphyre surpris,
Couroit sur les moissons sans courber les épis.
Ah ! Si la scene encore offroit à notre vue
Cette actrice adorée et trop tôt disparue,
Qui par son enjoûment savoit tout animer,
Et que, pour son éloge, il suffit de nommer !…
Je vous dirois sans cesse, ayez les yeux sur elle ;
Et je croirois tout dire, en l’offrant pour modele.
Il me semble la voir, l’œil brillant de gaîté,
Parler, agir, marcher avec légéreté ;
Piquante sans apprêt, et vive sans grimace,
À chaque mouvement acquérir une grace ;
Sourire, s’exprimer, se taire avec esprit ;
Joindre le jeu muet à l’éclair du débit ;