Ils peuvent librement, sans craindre pour leur flame,
Se parler en public des secrets de leur ame.
Ce n’est que pour eux seuls que brille un si beau jour ;
Et la décence même applaudit à l’amour.
Le plaisir m’égaroit ! La raison me ramene.
Muses, dont le pinceau peut enrichir la scene,
Joignez à mes essais vos efforts plus certains.
Pour former des acteurs, il faut des écrivains.
Tel qui, depuis long-tems, rampoit foible et timide,
Dans des rôles nouveaux a pris un vol rapide.
Remettez sous nos yeux le tableau de nos mœurs ;
Badinez avec nous pour nous rendre meilleurs.
Qui retient vos crayons ? Quels seroient vos scrupules ?
Moliere est sous la tombe, et non les ridicules.
Oui, chaque âge a les siens, vrais, caractérisés :
Ceux-là sont apparens, ceux-ci mal déguisés.
Il faut leur arracher cette enveloppe obscure ;
Il faut à chaque siecle assigner sa figure.
Avec des traits divers, le nôtre a ses Orgons ;
Il a ses imposteurs, il a ses Harpagons.
La nature, en créant, toujours se renouvelle :
Les vices, les travers sont variés comme elle.
Observez, parcourez et la ville et la cour ;
Dans nos cœurs, en riant, venez porter le jour.
Quel léger tourbillon va, vient, revient et roule,
Dieux ! Que d’originaux se présentent en foule !
Page:Dorat - Œuvres diverses, Neuchatel, 1775.djvu/92
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