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Page:Dorion - Vengeance fatale, 1893.djvu/33

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VENGEANCE FATALE

Celui-ci était un tout jeune homme qui appelait la sympathie par une figure noble et intelligente. Quand ses yeux avaient le malheur de se fixer sur l’anneau dont nous parlions ci-dessus, son front se ridait péniblement et sa figure prenait une empreinte très mélancolique. Ce jonc semblait lui rappeler quelque souvenir, et à l’expression de son visage, ce souvenir devait être douloureux. Mais dès que son attention s’en détachait, elle se portait immédiatement toute entière sur la jeune fille assise à ses côtés, et alors tout changeait en lui, tristesse et rides se dissipaient et ses yeux reprenaient une douceur ineffable, dès qu’ils se fixaient sur cet objet de toutes ses adorations.

Elle était vraiment jolie. De longs cheveux blonds tombant négligemment sur ses épaules ; sa figure presque toujours colorée par un teint rose et frais ; ses yeux d’un bleu céleste ; ses mains et enfin tous ses traits d’une délicatesse remarquable, lui donnaient une beauté virginale, celle qui caractérise le mieux les jeunes filles à cet âge.

Disons ici que le jeune homme et la jeune fille étaient fiancés et que leur mariage n’était retardé que par l’admission du premier à la profession du droit qu’il étudiait depuis bientôt quatre ans.

Pendant presque toute la durée de la représentation, la conversation des deux jeunes gens, aussi bien que l’attention qu’ils se portaient mutuellement, les avaient empêchés de suivre avec autant de soin qu’elle méritait la pièce donnée ce soir-là. Celui qui les accompagnait jetait parfois sur eux un regard de dépit. Il y avait quelque chose de méchant dans ce regard mêlé de dédain et d’envie. Sans doute cet homme n’avait jamais