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CHAPITRE XI

La Conception de l’Amour

Il semble difficile, qu’après de tels aveux, un doute subsiste, dans des esprits, même prévenus, sur la sensibilité que Leconte de Lisle mura derrière une froideur volontaire. Mais pour estimer à son juste prix la qualité de cette sensibilité-là, il suffira de préciser, tout d’abord, l’idée que le poète se formait de l’amour, puis de suivre l’homme à travers les épisodes de sa vie passionnelle.

Il serait imprudent de prendre au sérieux les déclarations d’un enfant de vingt ans qui se dit « affranchi du joug de l’amour ». Il convient pourtant de noter l’attitude que Leconte de Lisle, alors étudiant à Rennes, affectait sur ce sujet du sentiment. Dans une lettre adressée à un de ses amis, accompagnant une poésie écrite en l’honneur d’une jeune fille, il disait :

« Ne croyez pas, mon cher, qu’un sentiment plus profond — l’amour enfin — soit pour rien dans ces vers. L’amour et moi, voyez-vous, c’est de l’eau sur une pierre, elle peut la mouiller mais ne la pénètre jamais. À vous l’amour, mon ami, c’est-à-dire toutes les illusions que la femme laisse flot-