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CHAPITRE XIX

L’Épreuve du Théâtre

La certitude que ses vers étaient faits pour être dits, après qu’ils avaient été lus, et que, d’une façon générale, la poésie ne saurait se contenter du tête à tête du lecteur avec un livre, mais réclame les manifestations extérieures, le contact avec les foules, l’éclat sonore et voyant d’un culte, devait pousser Leconte de Lisle à désirer, pour son œuvre dramatique, les pompes extérieures et la révélation du théâtre. Il les souhaitait et il les craignait à la fois, car il voulait arriver sur la scène sans sacrifice, et il n’oubliait point que son intransigeance l’avait fait écarter, en 1871, par la Comédie-Française. M. Perrin lui avait renvoyé alors le manuscrit des Érinnyes en déclarant qu’il croyait inutile de soumettre ce poème à son comité de lecture.

Il fallut qu’un ami, M. Charles Edmond, se chargeât, presque en secret, de rouvrir des négociations du côté des théâtres. La stupéfaction de Leconte de Lisle fut donc vive lorsqu’il apprit que M, Duquesnel, directeur de l’Odéon, accueillait les Érinnyes, et qu’il décidait de monter la pièce immédiatement.