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ESSAI SUR LECONTE DE LISLE

« À travers la nue infinie
Et la fuite sans fin des temps,
Le chœur des astres éclatants
Se soumet à notre harmonie.
Tout n’est qu’un écho de nos voix
L’oiseau qui chante dans les bois,
La mer qui gémit et qui gronde
Le long murmure des vivants
Et la foudre immense et les vents :
Car nous sommes l’âme du monde ![1] »


Et ceci est bien la formule définitive de cette religion poétique et lyrique de la Sainte Beauté et de l’Art parfait, pour laquelle Leconte de Lisle a vécu. Il a passé sur la terre, dans un temps de critique, de machinisme, d’industrie, comme un Olympien en exil. Il a été vraiment le prêtre de ce Temple éblouissant que la magie de ses vers a évoqué pour toujours et précisé, dans une apparence incorruptible, entre la terre et le ciel[2].

  1. « L’Apollonide ». Derniers Poèmes.
  2. Jusqu’à la fin de sa vie, Leconte de Lisle parla d’une pièce de théâtre : Frédégonde, dont on n’a trouvé, dans ses papiers, que le fragment publié dans ces Derniers Poèmes. On lit, à ce propos, dans une lettre inédite de Flaubert adressée au Poète : « Coppée m’a dit que ta Frédégonde avançait : l’idée de l’exaltation à laquelle je serai en proie le jour de la première m’effraie d’avance. Quand sera-ce ? » D’autre part, Mme Sarah Bernhardt, se souvient d’avoir écouté la lecture d’un scénario de cette Frédégonde, que le poète ne laissa pas entre ses mains, et dont elle n’entendit plus parler.