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L’ÉPREUVE DU THÉÂTRE

pièce entière, on le sent, a été composée pour faire glorieusement surgir l’éclatante apparition qui la couronne.

Le temple de l’Apollon Delphien s’ouvre, à cette minute, comme la corolle d’une fleur magique, pour qu’à travers ses murs écartés, les générations des hommes découvrent la vision de l’Athéna telle qu’elle sera dans l’avenir, telle que, déjà, elle vit dans le rêve des poètes. Non pas celle, qui, comme toutes les choses périssables, est montée de la barbarie à la rusticité, de la rusticité à l’harmonie, mais une évocation complète, sublime, hors de l’espace et du temps, quelque chose comme une vision platonicienne de l’éternelle Idée, de l’Athéna qui s’est ébauchée dans la durée, aux pieds de l’Acropole, entre le Parthénon, la géante statue de Pallas, les trirèmes de Salamine, et l’Agora, où parla Démosthènes :


...... « Dans l’aurore et l’azur
Emplissant l’horizon de sa splendeur soudaine,
Monte, aux Cieux élargis, la Cité surhumaine…
Et la grande Pallas, le front ceint d’un éclair,
Dresse sa lance d’or sur les monts et la mer !…
Enfant ! tu vois la Fleur magnifique des âges
Qui s’épanouira sur le monde enchanté
La Ville des héros, des chanteurs et des sages,
Le Temple éblouissant de la sainte Beauté…[1] »


Et en même temps que ce décor s’illumine, les vraies citoyennes de la « Cité surhumaine » apparaissent. Ce sont les Muses, les Vierges sacrées :


« Délices du vaste univers…
Aux mitres d’or, aux lauriers verts,
Aux lèvres toujours inspirées…[2] »


Elles s’écrient :

  1. « L’Apollonide ». Derniers Poèmes.
  2. Ibid.