Page:Dostoïevski - Carnet d’un inconnu 1906.djvu/115

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— Voilà ! Voilà ! Tu parles trop, Evgraf, ajouta mon oncle. Ta langue te perdra ! Tu es un homme droit, honnête, de bonne conduite, on peut le dire, mais tu as une langue de vipère. Je m’étonne que tu puisses t’entendre avec eux, là-bas. Ce sont tous de braves gens, simples…

— Mon père et bienfaiteur, mais c’est précisément l’homme simple qui me fait peur ! s’écria le vieillard avec une grande vivacité.

La réponse me plut. Je m’élançai vers Éjévikine et lui serrai la main. À vrai dire, j’entendais protester ainsi contre l’opinion générale en montrant mon estime pour ce vieillard. Et, qui sait ? Peut-être voulais-je aussi me relever dans l’opinion de Nastassia Evgrafovna. Mais mon geste ne fut pas heureux.

— Permettez-moi de vous demander, fis-je en rougissant et, selon ma coutume, en précipitant mon débit ; avez-vous entendu parler des Jésuites ?

— Non, mon père, ou bien peu ; mais pourquoi cela ?

— Oh ! Je voulais raconter à ce propos… Faites-m’y donc penser à l’occasion… Pour le moment, soyez sûr que je vous comprends et que je sais vous apprécier, et, tout à fait confus, je lui saisis encore la main.