Page:Dostoïevski - Carnet d’un inconnu 1906.djvu/116

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— Comptez que je vous le rappellerai, mon petit ; je vais l’inscrire en lettres d’or. Tenez, je fais tout de suite un pense-bête. — Et il orna d’un nœud son mouchoir tout souillé de tabac.

— Evgraf Larionitch, prenez donc votre thé, lui dit ma tante.

— Tout de suite, belle Madame… je voulais dire princesse ! Et voici pour le thé que vous m’offrez : j’ai rencontré en route M. Bakhtchéiev. Il était si gai que je me suis demandé s’il n’allait pas se marier… De la flatterie, toujours de la flatterie ! — ajouta-t-il à mi-voix et avec un clin d’œil en passant devant moi, sa tasse à la main. — Mais comment se fait-il qu’on ne voie pas le principal bienfaiteur, Foma Fomitch ? Ne viendra-t-il pas prendre son thé ?

Mon oncle tressaillit comme si on l’eut piqué et regarda timidement la générale.

— Ma foi, je n’en sais rien, répondit-il avec une singulière confusion. On l’a fait prévenir, mais il… Sans doute n’est-il pas d’humeur… J’y ai déjà envoyé Vidopliassov et… si j’y allais moi-même ?...

— Je suis entré chez lui, dit Éjévikine d’un ton énigmatique.

— Est-ce possible ! s’écria mon oncle effrayé. Eh bien, qu’y a-t-il ?