Page:Dostoïevski - Carnet d’un inconnu 1906.djvu/245

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Dieu, tout est arrangé. Primo, on m’a pardonné ; on m’a complètement pardonné, à certaines conditions, il est vrai, mais je n’ai presque plus rien à craindre désormais. On a pardonné aussi à Sachourka. Tu te rappelles Sacha, Sacha, Sacha ! ce tantôt ?… Elle a la tête chaude et s’était un peu laissée aller, mais c’est un cœur d’or ; Dieu la bénisse. Je suis fier de cette fillette, Sérioja. Quant à toi, on te pardonne aussi. Tu pourras faire tout ce qu’il te plaira : parcourir toutes les pièces, te promener dans le jardin… à cette seule condition que tu ne diras rien demain ni devant ma mère, ni devant Foma Fomitch. Je le leur ai promis en ton nom ; tu écouteras, voilà tout… Ils disent que tu es trop jeune pour… Ne te formalise pas, Sergueï ; tu es en effet très jeune… Anna Nilovna est aussi de cet avis…

Il n’était pas douteux que j’étais fort jeune et je le prouvai sur-le champ en m’élevant avec indignation contre ces clauses humiliantes.

— Écoutez, mon oncle, m’écriai-je, presque suffoquant, dites-moi seulement une chose et tranquillisez-moi : suis-je ou non dans une maison de fous ?

— Te voilà bien ! Tu te mets tout de suite à critiquer ! Tu ne peux te contenir ! s’écria-t-il,