Page:Dostoïevski - Carnet d’un inconnu 1906.djvu/267

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je me rendrai chez lui de fort bonne heure. Je lui dirai tout, comme je viens de te le dire. Il me comprendra, car il est généreux ; c’est l’homme le plus généreux qu’il puisse exister. Une seule chose m’inquiète, ma mère n’aurait-elle pas prévenu Tatiana Ivanovna de la demande que je vais faire demain ? C’est cela qui serait fâcheux !

— Ne vous tourmentez pas au sujet de Tatiana Ivanovna, mon oncle ! — et je lui racontai alors la scène sous la tonnelle avec Obnoskine, mais sans souffler mot de Mizintchikov. Mon oncle s’en trouva très étonné.

— Quelle créature fantasque ! véritablement fantasque ! s’écria-t-il ! On veut la circonvenir à la faveur de sa simplicité ! Ainsi, Obnoskine… Mais il était parti ! Oh ! que c’est bizarre ! follement bizarre ! Serge, j’en suis abasourdi… Il faudrait faire une enquête et prendre des mesures… Mais es-tu bien sûr que ce soit Tatiana Ivanovna ?

Je répondis que, d’après tous les indices, cela devait être Tatiana Ivanovna, bien que je n’eusse pu voir son visage.

— Hum ! ne serait-ce pas plutôt une intrigue avec quelqu’une de la ferme que tu aurais prise pour Tatiana ? Ce pourrait très bien être Dasha, la fille du jardinier, une coquine avérée ; c’est pourquoi