— Eh ! liéchi, diable ! arrête !
Celui qui poussait ces cris venait de faire irruption d’un logement situé à l’un des étages inférieurs, et il descendait l’escalier de toute la vitesse de ses jambes en vociférant à tue-tête :
— Mitka ! Mitka ! Mitka ! Mitka ! Mitka ! Que le diable enlève le fou !
L’éloignement ne permit pas d’en entendre davantage ; l’homme qui proférait ces exclamations était déjà loin de la maison. Le silence se rétablit ; mais à peine cette alarme avait-elle pris fin qu’une autre lui succéda : plusieurs individus qui s’entretenaient ensemble à haute voix montaient tumultueusement l’escalier. Ils étaient trois ou quatre. Raskolnikoff distingua la voix sonore du jeune homme. « Ce sont eux ! »
N’espérant plus leur échapper, il alla carrément à leur rencontre : « Advienne que pourra ! se dit-il ; s’ils m’arrêtent, c’est fini ; s’ils me laissent passer, c’est fini encore : ils se souviendront de m’avoir croisé dans l’escalier. » Ils allaient le joindre, un étage seulement le séparait d’eux — et tout d’un coup voilà le salut ! À quelques marches de lui, à droite, un appartement était vide et grand ouvert, ce même logement du second étage où travaillaient des peintres, mais, comme par un fait exprès, ils venaient de le quitter.
C’étaient sans doute eux qui tout à l’heure étaient partis en poussant ces cris. On voyait que la peinture des parquets était toute fraîche, au milieu de la chambre les ouvriers avaient laissé leurs ustensiles : un cuveau, un tesson avec de la couleur et une grosse brosse. En un clin d’œil, Raskolnikoff se glissa dans le logement inoccupé et se dissimula de son mieux contre le mur. Il était temps : déjà ses persécuteurs arrivaient sur le palier, mais ils ne s’y arrêtèrent pas et montèrent au quatrième étage en causant bruyamment. Après avoir attendu qu’ils se fussent un peu éloignés,