— Autrefois… Quand j’étais enfant. Lis !
— Vous ne l’avez pas entendu à l’église ?
— Je… je n’y vais pas. Toi, tu y vas souvent ?
— N…on, balbutia Sonia.
Raskolnikoff sourit.
— Je comprends… Alors tu n’assisteras pas demain aux obsèques de ton père ?
— Si. J’ai même été à l’église la semaine dernière… j’ai assisté à une messe de requiem.
— Pour qui ?
— Pour Élisabeth. On l’a tuée à coups de hache.
Les nerfs de Raskolnikoff étaient de plus en plus irrités.
La tête commençait à lui tourner.
— Tu étais liée avec Élisabeth ?
— Oui… Elle était juste… elle venait chez moi… rarement… elle n’était pas libre. Nous faisions des lectures ensemble et… nous causions. Elle voit Dieu.
Raskolnikoff devint songeur : que pouvaient bien être les mystérieux entretiens de deux idiotes comme Sonia et Élisabeth ?
« Ici je deviendrais fou moi-même ! on respire la folie dans cette chambre ! » pensa-t-il. — Lis ! cria-t-il soudain avec un accent irrité.
Sonia hésitait toujours. Son cœur battait avec force. Il semblait qu’elle eût peur de lire. Il regarda avec une expression presque douloureuse « la pauvre aliénée ».
— Que vous importe cela ? puisque vous ne croyez pas ?… murmura-t-elle d’une voix étouffée.
— Lis, je le veux ! insista-t-il : tu lisais bien à Élisabeth !
Sonia ouvrit le livre et chercha l’endroit. Ses mains tremblaient, la parole s’arrêtait dans son gosier. Deux fois elle essaya de lire et ne put articuler la première syllabe.
« Un certain Lazare, de Béthanie, était malade »… proféra-t-elle enfin avec effort, mais tout à coup, au troisième