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Page:Dostoïevski - Journal d’un ecrivain.djvu/289

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JOURNAL D’UN ÉCRIVAIN

grève. Pour deux enfants il reste plus de fortune que pour six, et puis la femme se conserve plus longtemps. Elle continue à vivre maritalement avec son mari, mais rien que pour leur plaisir à tous deux. Malthus n’était pas de leur force ! En France, il y a beaucoup de propriétaires, et, grâce aux malins époux, les propriétés se fractionnent peu. Les trouvailles de ces gens ingénieux se répandent dans toute l’Europe. Du reste, si Ems est en retard à ce point de vue, Berlin est terriblement avancé ! Les ministres français ne se préoccupent que du sort de la bourgeoisie. Mais il y a le peuple, parfois non baptisé, dont bien des couples vivent en « union libre ». Ceux-là jettent, de temps à autre, leurs nouveau-nés à la rue. Les gamins parisiens naissent et meurent ; ils ne vivent pas : si, par hasard, ils résistent, ils remplissent les hospices pour enfants trouvés et les prisons pour criminels en bas âge. Dans Zola, un réaliste comme nous disons, on trouve une peinture très vraie du mariage français contemporain, de la cohabitation conjugale dans son roman le Ventre de Paris.

Remarquez que les gavroches d’aujourd’hui ne sont plus du tout des Français. Et les autres, ceux qui naissent propriétaires, ne sont pas plus des Français. La France cesse d’être la France. Je sais qu’il y a des gens qui se réjouiront de voir les Français disparaître. La race dégénérée s’affaiblit, et le moral est influencé par le physique. Ce sont les fruits du règne de la bourgeoisie. Selon moi, la principale faute remonte au système de propriété. Je vais vous l’expliquer.


IX

LA TERRE ET LES ENFANTS


La terre est tout, continua mon homme paradoxal. Je ne sais pas distinguer la terre des enfants, c’est instinc-