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Page:Dostoïevski - Journal d’un ecrivain.djvu/387

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JOURNAL D’UN ÉCRIVAIN

Je vous donne l’épisode prie dans l’Enfance et l’Adolescence, du comte Tolstoï, à cause d’une certaine analogie entre les deux cas. Mais il y a aussi une différence radicale. Le petit héros du comte Tolstoï pouvait, avec un attendrissement morbide, songer, à ce qui arriverait, si on le trouvait mort ; il pouvait même rêver au suicide, mais seulement y RÊVER. Il n’aurait jamais passé du concept à l’action. Les suicides d’enfants sont bien des événements d’aujourd’hui, d’aucune autre époque antérieure. Et puis il y a une question de milieu. Nous sommes parfaitement au courant de l’existence de la moyenne aristocratie dont le comte Tolstoï est comme l’historiographe attitré. Mais qui se fera l’historiographe des autres couches sociales, si mal étudiées jusqu’à présent ? Il existe certainement chez nous des milieux où la famille va se décomposant, mais à côté de cela il est évident qu’il y a une vie qui s’organise sur des bases nouvelles. Qui observera et cette vie nouvelle et les milieu nouveaux ? Qui nous les montrera ? Qui pourra déterminer les lois qui président cette décomposition et cette réorganisation ?