Page:Dostoïevski - L’Éternel Mari, trad. Nina Halpérine-Kaminsky, 1896.djvu/144

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comme lui, qui était en fonction auprès du gouverneur de V… et était très apprécié. Il lui arriva un jour de se quereller avec Goloubenko, le colonel, dans une société ; il y avait là des dames, et, parmi elles, la dame de son cœur. Il se sentit fort humilié, mais il avala l’offense, et ne dit mot. Peu après, Goloubenko lui souffla la dame de son cœur et la demanda en mariage. Que pensez-vous que fit Livtsov ? Eh bien, il fit en sorte de devenir l’ami intime de Goloubenko ; bien mieux, il demanda à être garçon d’honneur ; le jour du mariage, il tint son rôle ; puis, quand ils eurent reçu la bénédiction nuptiale, il s’approcha du marié pour le féliciter et l’embrasser, et alors, devant toute la noble société, devant le gouverneur, voilà mon Livtsov qui lui donne un grand coup de couteau dans le ventre et voilà mon Goloubenko qui tombe !… Son propre garçon d’honneur ! c’est bien ennuyeux ! Et puis ce n’est pas tout ! Ce qu’il y a de bon, c’est qu’après le coup de couteau, le voilà qui se jette à droite et à gauche : « Hélas ! qu’ai-je fait là ! hélas ! qu’ai-je fait ! » et qui sanglote, et qui s’agite, et qui se jette au cou de tout le monde, des dames aussi : « Hélas, qu’ai-je fait là ! »… Ha ! ha ! ha ! c’était à crever de rire. Il n’y avait que le pau-