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Page:Dostoïevski - L’Éternel Mari, trad. Nina Halpérine-Kaminsky, 1896.djvu/143

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tendre, — n’est pas homme à se donner Dieu sait quels airs, à poser pour le justicier exact et scrupuleux, à étudier son cas, en pédant, pour en tirer la matière d’une leçon, à pleurnicher, à grimacer, à se jeter au cou des gens, et à être satisfait de cet emploi de son temps !… Voyons, dites la vérité : est-il vrai que vous ayez voulu vous pendre ?

— Oh ! vous savez, c’est bien possible, dans une heure d’ivresse… je ne me rappelle pas… Mais voyons, Alexis Ivanovitch, des gens comme nous ne peuvent pourtant pas se servir de poison ! Outre que je suis un fonctionnaire bien noté, j’ai quelque argent, et il est bien possible que je songe à me remarier.

— Et puis, on risque les travaux forcés.

— Parfaitement ! et c’est très désagréable, bien qu’à présent le jury accorde volontiers les circonstances atténuantes. Tenez, Alexis Ivanovitch, il m’est revenu ce matin, pendant que j’étais dans ma voiture, une petite histoire très drôle, qu’il faut que je vous raconte. Vous parliez tout à l’heure de l’homme « qui se jette au cou des gens ». Vous vous rappelez peut-être Semen Petrovitch Livtsov, qui est arrivé à T…de votre temps ? Eh bien, il avait un frère cadet, un jeune beau de Pétersbourg,