Page:Dostoïevski - L’Éternel Mari, trad. Nina Halpérine-Kaminsky, 1896.djvu/72

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Veltchaninov. Natalia Vassilievna, pendant ce temps-là, brodait et écoutait tranquillement. On lisait des romans de Dickens, quelque article d’une revue russe, parfois quelque chose de « sérieux ». Natalia Vassilievna appréciait fort la culture de Veltchaninov, mais en silence, comme une chose accordée, dont il n’y avait plus lieu de parler : en général, les livres et la science la laissaient indifférente, comme une chose utile, mais qui lui était étrangère : Pavel Pavlovitch y mettait parfois de l’ardeur. Cette liaison se rompit subitement, au moment où la passion de Veltchaninov, qui n’avait fait que grandir, lui ôtait presque l’esprit. On le chassa, tout simplement, tout d’un coup, et cela fut arrangé si bien qu’il partit sans se rendre compte qu’on l’avait rejeté « comme une vieille savate usée ». Un mois et demi avant son départ, était arrivé à T… un jeune officier d’artillerie, qui sortait à peine de l’École. Il fut reçu chez les Trousotsky : au lieu de trois, on fut quatre. Natalia Vassilievna accueillit le jeune homme avec beaucoup de bienveillance, mais le traita comme un enfant. Veltchaninov ne se douta de rien ; même il ne comprit pas, le jour où on lui signifia que la séparation était