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Page:Dostoïevski - L’Éternel Mari, trad. Nina Halpérine-Kaminsky, 1896.djvu/99

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curiosité silencieuse et attentive des enfants. Au même instant, Klavdia Petrovna sortait de la maison, et, derrière elle, son mari. Eux aussi, leur premier mot fut pour lui demander en riant où en était son procès.

Klavdia Petrovna était une femme de trente-sept ans, brune, forte, encore jolie, le teint frais, avec des couleurs. Son mari était un homme de cinquante-cinq ans, intelligent et fin, surtout très bon. Leur maison était vraiment, pour Veltchaninov, « un coin de famille », comme il disait. Voici pourquoi.

Vingt ans auparavant, Klavdia Petrovna avait failli épouser Veltchaninov, alors qu’il était encore un étudiant, presque un enfant. Ç’avait été le premier amour, l’amour ardent, l’amour absurde et admirable. Tout cela avait fini par son mariage avec Pogoreltsev. Ils se retrouvèrent cinq ans plus tard, et leur amour de jadis devint une amitié franche et calme. De l’ancienne passion il ne subsistait qu’une sorte de lueur chaude, qui colorait et échauffait leurs relations d’amitié. Il n’y avait rien que de pur et que d’irréprochable dans le souvenir que Veltchaninov conservait du passé, et il y tenait d’autant plus que c’était là, peut-être, une chose unique en sa vie. Ici, dans cette famille,