faction de ce triomphe qui semblait donner un démenti si formel aux désolantes prédictions d’Hippolyte. Un orgueilleux sourire s’épanouit sur les lèvres du jeune homme, Barbara Ardalionovna elle-même devint radieuse.
— Et cela le jour même où doivent avoir lieu les fiançailles ! Allez donc y comprendre quelque chose !
— À ton avis, de quoi veut-elle me parler demain ? questionna Gania.
— Peu importe ; le grand point, c’est que, pour la première fois depuis six mois, elle manifeste le désir de te voir. Écoute-moi, Gania : quoi qu’il arrive, quelque tournure que prenne l’entretien, sache que c’est important ! C’est très-important ! Ne va pas faire encore le fanfaron, prends garde de commettre les mêmes bévues qu’autrefois, mais n’aie pas peur non plus, fais-y attention ! Pouvait-elle ne pas deviner pour quel motif j’allais si souvent les voir depuis six mois ? Et figure-toi : elle ne m’a pas dit un mot aujourd’hui, elle n’a fait semblant de rien. J’ai été reçue en cachette, à l’insu de la vieille qui, sans cela, m’aurait probablement mise à la porte. Je me suis exposée à ce risque pour toi ; coûte que coûte, je voulais savoir…
De nouveaux cris retentirent, venant d’en haut ; puis on entendit les pas de plusieurs personnes qui descendaient l’escalier.
L’épouvante s’empara de Varia.
— Pour rien au monde il ne faut le laisser sortir maintenant ! cria-t-elle au plus vite : — qu’il n’y ait pas même une ombre de scandale ! Va lui demander pardon !
Mais le père de famille était déjà dans la rue ; derrière lui marchait Kolia qui portait son sac. Debout sur le perron, Nina Alexandrovna pleurait ; elle aurait voulu courir après son mari, mais Ptitzine l’en empêcha.
— Cela ne servira qu’à l’exciter encore plus, lui dit-il, — il ne peut aller nulle part, dans une demi-heure on le ramènera, j’ai déjà parlé à Kolia ; laissez-le faire ses folies.
— Pourquoi faire ainsi la mauvaise tête ? Où allez-vous ?