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Page:Dostoïevski - L’Idiot, tome 2.djvu/222

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se mit à crier par la fenêtre Gabriel Ardalionovitch : — vous n’avez même pas où aller !

— Revenez, papa, supplia Varia. — Les voisins entendent.

Le général s’arrêta, fit volte-face et s’écria en étendant le bras :

— Je maudis cette maison !

— Et nécessairement sur un ton théâtral ! grommela Gania en fermant la fenêtre avec bruit.

Les voisins entendaient en effet. Varia sortit précipitamment de la chambre.

Resté seul, Gania prit le billet sur la table, le porta à ses lèvres, fit claquer sa langue contre son palais et battit un entrechat.

III

En toute autre circonstance, il ne serait rien résulté de l’incident orageux que nous venons de raconter. Ardalion Alexandrovitch avait déjà eu des crises semblables, — assez rarement, il est vrai, car c’était en général un homme fort paisible et doué d’inclinations plutôt bonnes que mauvaises. Cent fois peut-être, il avait essayé de réagir contre les habitudes de désordre contractées par lui dans ces dernières années. Il se rappelait tout d’un coup qu’il était « père de famille », se réconciliait avec sa femme, versait des larmes sincères. Il vénérait jusqu’à l’adoration Nina Alexandrovna, qui lui pardonnait silencieusement tant de choses et qui continuait à l’aimer, nonobstant l’état de dégradation dans lequel il était tombé. Mais cette lutte généreuse contre les séductions du vice ne durait jamais bien longtemps ; le général était aussi, dans son genre, un homme « impétueux » ; la vie tranquille et pénitente au sein de sa famille ne tardait pas à lui devenir insupportable et il finissait par