Aller au contenu

Page:Dostoïevski - L’Idiot, tome 2.djvu/350

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

Ivanovna se fut enfuie de chez Nastasia Philippovna, le prince se présenta à la villa des Épantchine, persuadé, sans doute, qu’il y trouverait la jeune fille ; son arrivée jeta l’émoi dans la maison, car Aglaé Ivanovna n’était pas encore rentrée au logis et ce fut par le prince que les parents eurent la première nouvelle de la visite qu’elle avait faite avec lui à Nastasia Philippovna. On a raconté que la générale, ses filles et même le prince Chtch… s’étaient montrés alors extrêmement durs pour Muichkine et lui avaient déclaré avec irritation qu’ils ne voulaient plus le connaître. Ce qui contribua surtout à les indisposer contre le prince fut l’intervention soudaine de Barbara Ardalionovna. La jeune femme vint dire tout à coup à Élisabeth Prokofievna qu’Aglaé Ivanovna était chez elle depuis une heure déjà, qu’elle se trouvait dans un état terrible et ne voulait pas retourner chez ses parents. Cette dernière nouvelle qui, plus que tout le reste, consterna la générale, était parfaitement exacte : au sortir de chez Nastasia Philippovna, Aglaé serait morte plutôt que de reparaître en ce moment devant les siens, aussi avait-elle couru tout de suite chez Nina Alexandrovna. De son côté, Barbara Ardalionovna avait cru devoir informer immédiatement de tout cela Élisabeth Prokofievna. La mère et les filles partirent sur-le-champ pour la demeure de Ptitzine, où se rendit après elles Ivan Fédorovitch lui même, dès qu’il fut arrivé de Pétersbourg. Le prince Léon Nikolaïévitch suivit les dames Épantchine, nonobstant le congé brutal qu’elles venaient de lui signifier, mais, grâce aux mesures prises par Barbara Ardalionovna, là non plus il ne put avoir accès auprès d’Aglaé. La jeune fille s’attendait à des reproches : lorsqu’elle vit sa mère et ses sœurs pleurer silencieusement, elle se jeta dans leurs bras et retourna tout de suite à la maison avec elles. Le bruit a couru que Gabriel Ardalionovitch avait encore joué de malheur dans cette circonstance ; sa sœur étant allée chez Élisabeth Prokofievna, il resta en tête-à-tête avec Aglaé et profita de l’occasion pour lui parler