Page:Dostoïevski - Le Rêve de l’oncle, trad. Kaminsky, 1895.djvu/12

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

journée, pourquoi, cependant, à l’aspect de Maria Alexandrovna, tant elle est majestueuse, ne vient-il à l’esprit de personne qu’elle soit la première commère du monde ou au moins de Mordassov ? Il semble bien plutôt qu’à sa vue tous les commérages doivent cesser, les commères trembler comme des gamins devant leur pion, et les conversations se guinder aussitôt aux sujets les plus relevés. Elle sait pourtant sur certains Mordassoviens de si scandaleuses chroniques que, si elle les disait à propos et en en prouvant — comme elle sait faire — l’authenticité, tout Mordassov tremblerait comme jadis Lisbonne. Mais c’est le tombeau des secrets : il faut un concours de circonstances extraordinaire pour qu’elle consente à parler de certaines choses, — et encore à ses amis les plus intimes. Elle pourra risquer une allusion, laisser entendre qu’elle est « au courant » ; mais elle aime à tenir l’individu, homme ou femme, dans la suggestion d’une crainte perpétuelle, au lieu