Page:Dostoïevski - Le Sous-sol, 1909.djvu/28

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cer, car deux fois deux, c’est les mathématiques ! Essayez donc de répondre à cela !

« Permettez ! — me criera-t-on — il n’y a pas à se révolter, car deux fois deux font quatre ! La nature ne vous demande aucune permission ; elle n a rien à faire avec vos désirs et ne s’occupe pas de savoir si ses lois vous plaisent ou non ? Vous devez l’accepter comme elle est avec toutes ses conséquences. C’est un mur, donc… c’est un mur… et ainsi de suite ! »

Mon Dieu, que m’importent les lois de la nature et celles de l’arithmétique si ces lois et leur « deux fois deux : quatre », ont quelque motif de me déplaire ? Je ne briserai certainement pas cette muraille avec mon front si mes forces n’y suffisent pas, mais je ne me résignerai pas uniquement parce que j’ai devant moi une muraille de pierre que mes forces ne suffisent pas à briser.

Cette muraille serait-elle en réalité un calmant ? et contiendrait-elle la moindre vertu apaisante pour cette seule raison qu’elle est deux fois deux quatre ? Oh ! absurdité des absurdités ! Que c’est donc autre chose de tout comprendre, d’avoir conscience de tout, de toutes les murailles d’impossibilité et de pierre, de ne se résigner devant aucune de ces impossibilités, aucune de ces murailles de pierre (s’il vous dégoûte de vous résigner), et, par des raisonnements logiques et incoercibles,