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Page:Dostoïevski - Les Frères Karamazov, trad. Mongault, tome 2.djvu/147

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peut s’empêcher de les poser et qu’il a raison ; il sent aussi qu’un attendrissement le gagne, qu’il va pleurer ; il voudrait consoler le petiot et sa mère aux seins taris, sécher les larmes de tout le monde, et cela tout de suite, sans tenir compte de rien, avec toute la fougue d’un Karamazov.

« Je suis avec toi, je ne te quitterai plus », lui dit tendrement Grouchegnka. Son cœur s’embrase et vibre à une lumière lointaine, il veut vivre, suivre le chemin qui mène à cette lumière nouvelle, cette lumière qui l’appelle…

« Quoi ? Où suis-je ? » s’écria-t-il en ouvrant les yeux. Il se dressa sur sa malle comme au sortir d’un évanouissement, avec un radieux sourire. Devant lui se tenait Nicolas Parthénovitch, qui l’invita à entendre la lecture du procès-verbal et à le signer.

Mitia se rendit compte qu’il avait dormi une heure ou davantage, mais il n’écoutait pas le juge. Il était stupéfait de trouver sous sa tête un coussin qui n’y était pas, lorsqu’il s’était allongé épuisé sur la malle.

« Qui a mis ce coussin ? Qui a eu tant de bonté ? » s’écria-t-il avec exaltation, d’une voix émue, comme s’il s’agissait d’un bienfait inestimable.

Le brave cœur qui avait eu cette attention demeura inconnu, mais Mitia était touché jusqu’aux larmes. Il s’approcha de la table et déclara qu’il signerait tout ce qu’on voudrait.

« J’ai fait un beau rêve, messieurs » dit-il d’une voix étrange, le visage comme illuminé de joie.


IX

On emmène Mitia

Le procès-verbal une fois signé, Nicolas Parthénovitch s’adressa solennellement à l’accusé et lui donna lecture d’une « ordonnance », aux termes de laquelle lui, juge d’instruction… ayant interrogé le prévenu… (suivaient les chefs d’accusation), attendu que celui-ci, tout en se déclarant innocent des crimes qu’on lui reprochait, n’avait rien produit pour se justifier, que cependant les témoins… et les circonstances… l’inculpaient entièrement, vu les articles… du Code pénal,