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qu’on l’avait portée ; les autres, qu’elle n’avait pu faire une telle chose qu’aidée de forces surnaturelles.

Grigory courut à toutes jambes chercher sa femme et l’envoya à Lizaveta. Lui-même alla quérir une vieille sage-femme qui habitait à peu de distance. On sauva l’enfant, mais Lizaveta mourut vers l’aube. Grigory prit le nouveau-né, l’emporta dans le pavillon et le mit sur les genoux de sa femme :

« Les orphelins sont les enfants de Dieu. Celui-ci est né du diable et d’une sainte. Élève-le ! »

Voilà comment Martha Ignatievna fut chargée d’un enfant. On le baptisa du nom de Pavel, auquel tout le monde ajouta celui de Fédorovitch[1]. Fédor Pavlovitch n’y contredit pas, trouvant même la chose très-amusante, tout en continuant de nier cette paternité. On l’approuva d’avoir recueilli l’enfant. Plus tard, il lui donna le nom de Smerdiakov, du nom de sa mère Smerdiatchaïa. Il servait Fédor Pavlovitch comme domestique et vivait dans le pavillon entre le vieux Grigory et la vieille Martha. Il avait les fonctions de cuisinier.

III

Après la sortie de son père, Alioscha resta quelques instants abasourdi. Quitter tout de suite le monastère ! Il

  1. En Russie, on ajoute toujours au nom de baptême de l’enfant le nom de baptême paternel, augmenté de la désinence ovitch.