Page:Dostoïevski - Les Frères Karamazov 1.djvu/134

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

124 LES FRERES KARAMAZOV.

— Vous en prenez trop, risqua timidement Alioscha.

— Attends! encore un, puis encore un, et c'est tout. Dis donc, Alioscha, est-ce que je ne suis décidément qu'un boulîon?

— Non, je sais que vous n'êtes pas un boulîon.

— Je te crois sincère, Ivan ne l'est pas, c'est un orgueil- leux! Ah çà! je voudrais bien en finir avec ton monas- tère. Il faudrait délivrer la terre russe de toute la gent mystique. Que d'or elle enlève à la Monnaie!

— Confisquer les biens des monastères, demanda Ivan, pourquoi?

— Pour hâter l'avènement de la vérité.

— Mais c'est vous, tout le premier, que déposséderait l'avènement de la vérité.

— Baste ! . . . mais tu as peut-être raison ! Quel âne je suis ! s'écria Fédor Pavlovitch en se frappant le front. Diable ! je laisse désormais ton monastère tranquille, Ahoscha. Nous autres, gens d'esprit, restons au chaud et buvons du cognac. Dieu a bien fait les choses. Ivan, dis -moi, existe-t-il, ce Dieu-là, oui ou non? Attends, parle-moi sérieusement.

— Non, il n'y a pas de Dieu.

— Alioscha, Dieu existe-t-il?

— Oui, il existe.

— Ivan, y a-t-il une immortalité, oh! mais une toute petite innnorlalité, la plus petite possible?

— Non, pas plus d'immortalité que de Dieu.

— Pas du tout?

— Pas du tout.

— C'est-à-dire , un zéro absolu ou une petite fraction

�� �