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180 LES FRÈRES KARAMAZOV.

revancher de l'humiliation de la veille. Tout à coup son visage s'assombrit, il y avait de la méchanceté dans l'éclat de ses yeux.

— C'est, en effet, ma pensée, dit Ivan. Toute autre aurait tort d'agir ainsi : vous avez raison. Vous êtes sincère, d'une sincérité absolue, et c'est justement pourquoi vous avez raison...

— Mais c'est un mouvement passager ! interrompit madame Khokhlakov, c'est le ressentiment d'hier.

L'excellente dame n'avait pu se retenir de faire cette observation, d'ailleurs très-juste.

— Ehl ouil interrompit à son tour Ivan, avec une sorte d'emportement.

Il était évidemment irrité de l'observation de madanio Khokhlakov.

— C'est cela, reprit-il, chez une autre ce ne serait en effet qu'un mouvement passager. Mais avec l'âme de Kathe- rina Ivanovna, c'est pour la vie. Ce qui pour les autres n'est qu'une promesse faite à la légère est un engagement sacré pour elle. Votre vie, Katherina Ivanovna, se consu- mera désormais dans une douloureuse contemplation de vos vertus. Mais la souffrance finira par se calmer, votre dévouement sera très-adouci par la satisfaction que le devoir accompli verse dans les âmes orgueilleuses.

Il parlait d'un ton âpre, ironique, et sans même prendre la peine de cacher son ironie.

— Dieu ! (jue tout cela est faux ! s'écria de nouveau madame Khokhlakov.

— Alexey Fédorovitch, parlez ! je suis impatiente de vous entendre, dit Katherina Ivanovna.

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