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Page:Dostoïevski - Les Frères Karamazov 1.djvu/240

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des temps, alors qu’il apparaîtra tout à coup , dans tout l’éclat de Sa gloire et de Sa divinité, « tel que l’éclair qui vibre à la fois d’Orient en Occident » . Aujourd’hui, Il a voulu seulement faire à Ses enfants une visite , et II a choisi le lieu et l’heure où flambaient les bûchers. Il a repris cette forme humaine déjà portée quinze siècles auparavant du- rant trente-trois années.

Le voici qui descend parmi la cendre des bûchers. Pré- cisément hier , le cardinal grand inquisiteur, en présence du Roi, des seigneurs , des chevaliers, des cardinaux et des plus charmantes dames de la cour, devant tout le peuple assemblé, a brûlé un cent d’hérétiques ad majorem gloriam Dei. Sans chercher à exciter l’attention , IL marche modestement. Mais tous le reconnaissent.

Ce serait une des plus belles pages du poëme, si je par- venais à bien faire comprendre pourquoi on Le reconnaît. Le peuple, emporté par un irrésistible élan, se presse sur Son passage et Lui fait cortège. Silencieux, avec un sou- rire plein de compassion, Il traverse les rangs de la foule ; l’amour embrase Son âme; de Ses yeux émanent la LUMIÈRE , la SCIENCE et la FORCE en rayons ardents qui éveillent l’amour parmi les hommes. Il leur tend les bras. Il les bénit. De Lui, de Ses vêtements même se dégage une vertu qui guérit. Un vieillard, aveugle-né, sort de la foule et crie : « Seigneur, guéris-moi, que je puisse te voir! » Une écaille tombe de ses yeux et l’aveugle voit. Le peuple verse des larmes de joie et baise la terre où IL a marché. Les enfants jettent des fleurs sur Ses pas et chantent : « Ilosanna ! » et le peuple s’écrie : « C’est LUI! ce doit être LUI 1 ce ne peut être que LUI ! »