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LES FRERES KARAMAZOV. 281

pas mes yeux. Je n'aurais jamais cru que tu serais venu. Le moment est mauvais, mais je suis contente tout de même. Assieds-toi sur le divan, ici, mon jeune astre. Eh! Rakitka, que n'es-tu venu hier plutôt î Enfin, je suis contente tout de même. Peut-être cela vaut -il mieux ainsi.

Elle s'assit près d'AUoscha et le regarda avec joie. Elle était sincèrement heureuse. Ses yeux brillaient, elle sou- riait. AUoscha ne s'attendait pas à une aussi bonne récep- tion,

— Dieu! qu'il se passe des choses extraordinaires aujourd'hui ! Que je suis heureuse ! D'ailleurs je ne sais pourquoi.

— Comme si tu ne le savais pas ! dit Rakitine en sou- riant. Tu avais une raison pour me répéter sans cesse : Amène-le ! amène-le !

— Oui, j'avais un but. mais ça m'a passé... Ce n'est plus le moment... Assieds-toi donc aussi, Rakitka. Je me sens très-bonne aujourd'hui. Pourquoi donc es-tu si triste, Alioscha? As-tu peur de moi?

— lia un chagrin. On n'a pas accordé le grade...

— Quel grade ?

— Son vieillard pue.

— Comment? il pue? Quelle bêtise! Tu dis toujours des saletés... Tais-toi, imbécile! Alioscha, laisse-moi m'asseoir sur tes genoux, comme cela.

Elle se leva en riant, sauta sur les genoux d'AUoscha comme une chatte amoureuse, en enlaçant son cou ten- drement.

— Je vais te faire passer ton chagrin, mon petit dévot.

16.

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