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Page:Dostoïevski - Les Frères Karamazov 1.djvu/68

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— Sortons ! s’écria Petre Alexandrovitch, en s’adressant à Kalganov.

— Non, permettez, interrompit Fédor Pavlovitch faisant un pas en avant, permettez-moi de finir. On a prétendu que je m’étais conduit irrespectueusement dans la cellule, en parlant des petits poissons. Petre Alexandrovitch Mioussov, mon cher parent, préfère la noblesse à la sincérité. Moi, au contraire, je préfère la sincérité à la noblesse. Je crache sur la noblesse, n’est-ce pas, Von-Zohn ? Permettez, Père supérieur : que je sois un bouffon ou que je me présente comme tel, je n’en suis pas moins un chevalier d’honneur, tandis que Petre Alexandrovitch n’a que de l’amour-propre blessé, rien de plus… Chez vous autres, ce qui tombe n’a pas le droit de se relever ? Je me relèverai pourtant ! Mais, saint Père, il y a quelque chose chez vous qui me révolte ! La confession ! C’est une chose sacrée, devant quoi je m’incline, je suis prêt à m’agenouiller. Mais dans vos cellules, on se confesse à haute voix ! Est-il donc permis de se confesser à haute voix ? Les saints ont décidé qu’on ne doit se confesser qu’à voix basse, c’est là l’essence du sacrement depuis son institution. Comment puis-je dire tout haut ceci, cela, et autre chose ? C’est inconvenant ! À la première occasion je soumettrai cela au synode, et, en attendant, je retirerai d’ici mon fils Alexey.

Notons en passant que Fédor Pavlovitch avait entendu dire quelque chose dans ce sens, mais il ne savait au juste quoi. Des calomnies avaient couru au sujet des staretsi : ils auraient, au préjudice de leurs supérieurs, abusé des saints sacrements, calomnies qui, depuis, sont tombées d’elles-mêmes.