Page:Dostoïevski - Les Frères Karamazov 2.djvu/14

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je serai venue en aide. Vous avez dû entendre parler de ma cousine Delmessiva ? Son mari était dans le malheur, s’écroulait, selon votre expression si caractéristique. Eh ! oui, je lui ai conseillé de se faire éleveur de chevaux : il est florissant à cette heure ! Avez-vous pensé à l’élevage de chevaux, Dmitri Fédorovitch ?

— Jamais, madame, oh ! madame, jamais ! s’écria Mitia, et n’y tenant plus, il se leva. Je vous supplie de m’écouter, donnez-moi deux minutes pour que je puisse vous exposer mon projet. Je suis d’ailleurs très-pressé, cria Dmitri dans l’espoir de la faire taire en parlant plus vite et plus haut qu’elle. Je suis venu à vous désespéré, pour vous emprunter trois mille roubles sur un gage sûr, madame, laissez-moi vous dire…

— Après, après, fit madame Khokhlakov en agitant la main. Je sais tout ce que vous voulez me dire. Vous me demandez trois mille roubles ? Je vous en donnerai plus, beaucoup plus ; je vous sauverai, Dmitri Fédorovitch, mais il faut m’obéir.

Dmitri sursauta sur place.

— Madame, vraiment, vous serez si bonne ! Seigneur ! Vous sauvez un homme de la mort, du suicide… mon éternelle reconnaissance…

— Je vous donnerai infiniment, infiniment plus de trois mille roubles, répéta madame Khokhlakov en regardant avec un sourire serein la joie de Mitia.

— Infiniment ! Je n’ai pas besoin de plus. Il me faut seulement cette fatale somme, trois mille. Merci ! écoutez mon projet qui…

— Assez, Dmitri, c’est dit, c’est fait, coupa court ma-