public. Les amateurs et les jurisconsultes l’admirèrent. Mais ils se demandaient à quoi servirait tant d’adresse, puisque la culpabilité de l’accusé n’en restait pas moins évidente. L’assurance « du grand mage » ne laissait pourtant pas d’étonner, et l’on attendait : ce n’était pas pour rien qu’un pareil homme était venu de Saint-Pétersbourg !
III
On passa aux témoins à décharge. Tout d’abord on interrogea Alioscha. Il était visiblement sympathique aux ennemis aussi bien qu’aux amis de l’accusé. Il décrivit le caractère de son frère comme un homme emporté par ses passions, mais noble, orgueilleux, généreux, capable de se sacrifier lui-même. Il accorda pourtant que sa passion pour Grouschegnka l’avait rendu « difficile à vivre ». Mais il nia formellement la culpabilité.
— Votre frère vous a-t-il dit qu’il avait l’intention de tuer son père ? demanda le procureur. Vous pouvez ne pas répondre si cela vous plaît.
— Directement, il ne me l’a pas dit.
— Indirectement, alors ?
— Il m’a parlé un jour de sa haine pour notre père ; il semblait craindre… que, poussé à bout… il pût le tuer.
— L’avez-vous cru ?
— Je ne peux l’affirmer ; j’étais toujours convaincu qu’un bon sentiment le sauverait au moment fatal : c’est