Page:Dostoïevski - Les Frères Karamazov 2.djvu/62

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avec dépit Grouschegnka. Pourquoi donc restons-nous assis ? Il faut nous égayer, faire quelque chose !

— En effet, ce n’est pas drôle du tout ici ! dit Kalganov en bâillant.

— Si l’on jouait aux cartes comme tout à l’heure, hi ! hi !

— Aux cartes ! Quelle bonne idée ! Les panove sont-ils de cet avis ?

— Il est tard, pane, dit d’un air las le pane à la pipe.

— En effet, appuya le pane Vroublevsky.

— Il faut toujours qu’ils empêchent les autres de s’amuser ! s’exclama Grouschegnka. Ils s’ennuient et veulent que les autres s’ennuient aussi.

— Ma déesse, soupira le pane à la pipe, on fera ce que tu voudras. Ce sont tes mauvaises dispositions à mon égard qui m’attristent. Je suis à vos ordres, pane, conclut-il en s’adressant à Mitia.

— Commence, pane ! dit Mitia en tirant de sa poche sa liasse dont il détacha deux billets qu’il posa sur la table. Je veux te faire gagner beaucoup d’argent. Prends les cartes.

— Je ne jouerai qu’avec les cartes du patron, dit gravement le pane à la pipe.

— Cela vaut mieux, appuya de nouveau le pane Vroublevsky.

— Les cartes du patron, soit ! celles du patron, très-bien, panove ! Des cartes ! cria Mitia.

Le patron apporta un jeu de cartes cacheté et déclara à Mitia que les babas étaient déjà réunies, que les Juifs allaient bientôt venir et que la troïka des provisions venait d’arriver. Mitia courut aussitôt dans la chambre voisine