satisfaction, des sourires courtisanesques apparaissaient sur quelques visages.
Bref, toute la ville découvrit soudain que ce n’était pas Julie Mikhaïlovna qui avait dédaigné jusqu’à présent de faire visite à Barbara Pétrovna, mais que c’était au contraire la seconde qui avait tenu la première à distance. Quand on fut convaincu que, sans la crainte d’être mise à la porte, la gouvernante serait allée chez la générale Stavroguine, le prestige de cette dernière se releva d’une façon incroyable.
— Prenez place, ma chère, dit Barbara Pétrovna à mademoiselle Lébiadkine en lui montrant la calèche qui s’était approchée ; la « malheureuse » s’avança joyeusement vers la portière, et un laquais l’aida à monter.
— Comment ! vous boitez ! s’écria la générale épouvantée et elle pâlit. (Tous le remarquèrent alors, mais sans comprendre…)
La voiture partit. De la cathédrale à la maison de Barbara Pétrovna la distance était fort courte. À ce que me raconta plus tard Élisabeth Nikolaïevna, mademoiselle Lébiadkine ne cessa de rire nerveusement pendant les trois minutes que dura le trajet. Quant à Barbara Pétrovna, elle était « comme plongée dans un sommeil magnétique », suivant l’expression même de Lisa.