Page:Dostoïevsky - L’Esprit souterrain, trad. Halpérine et Morice, 1886.djvu/236

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― Mais pourquoi mourrais-je ? ― répondit-elle comme si elle se défendait.

― Mais tu mourras certainement un jour, et tu mourras précisément comme celle dont je te parlais. C’était aussi une fille, elle est morte de phthisie…

― Une fille meurt à l’hôpital…

(Elle le sait donc déjà, pensai-je, et elle a dit : une fille, et non pas : une jeune fille.)

― Elle devait de l’argent à sa patronne, repris-je, de plus en plus surexcité par la discussion. Elle l’a servie jusqu’à la fin, quoique phthisique. C’est ce que les cochers d’alentour, probablement ses anciens amis, racontaient à des soldats. Et ils riaient ! Ils s’apprêtaient à aller au cabaret pour solenniser l’enterrement.

(Ici encore, j’inventais un peu.)

Un silence. Un profond silence. Elle ne remuait même pas.

― Est-ce donc mieux de mourir à l’hôpital ?

― C’est la même chose. Mais pourquoi mourrai-je ? ― ajouta-t-elle, irritée.

― Pas maintenant, plus tard.

― Eh bien, plus tard…