Page:Dostoievski - Les Pauvres Gens.djvu/116

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je copie pour elle les papiers les plus importants. Allons, je n’ai pas de style, je sais moi-même que ce maudit style me fait défaut ; c’est ce qui m’a arrêté dans ma carrière, et c’est aussi pour cela qu’en ce moment même, ma chère, je vous écris à la bonne franquette, sans prétention, comme les idées me viennent... Je sais tout cela, mais pourtant, si tout le monde était écrivain, qui est-ce qui serait copiste ? Voilà la question que je pose, et je vous prie d’y répondre, matotchka. Eh bien, je sens maintenant que l’on a besoin de moi, que je suis nécessaire, et que ces sottes taquineries n’ont aucune raison d’être. Allons, soit, mettons que je suis un rat, puisqu’ils ont trouvé cette comparaison ! Mais ce rat est nécessaire, mais ce rat a son utilité, mais on tient à ce rat, mais ce rat va recevoir une gratification, voilà quel rat c’est ! Du reste, assez là-dessus, ma chère ; je ne voulais même pas parler de cela, mais je me suis laissé entraîner. Après tout, de temps en temps on aime à se rendre justice. Adieu, ma chère, mon amie, ma bonne consolatrice ! Je passerai chez vous, je n’y manquerai pas ; j’irai vous voir, ma petite belette. Et en attendant, ne vous ennuyez pas.