choses, il est quelque peu audacieux de la proposer aux Russes comme un élément de gaieté. En homme borné qu’il est, Makar Diévouchkine se fait de la société une conception fort naïve à coup sûr, mais cette façon de voir lui procure, du moins, quelque tranquillité morale : la conception égalitaire dont nous sommes férus, outre qu’elle n’est peut-être pas beaucoup plus intelligente, a l’inconvénient de nous agiter sans relâche. Laissons donc le pauvre tchinovnik croire au droit divin des conseillers d’État actuels, etc. ; ce n’est pas la peine de le désabuser, il n’en sera pas plus heureux.
En regard de son employé, l’auteur a placé une jeune fille, victime comme lui d’une fatalité malheureuse. Le caractère de Varvara Alexéievna est tracé avec beaucoup d’art ; mais, nonobstant le charme que Dostoïevsky a essayé de répandre sur ce personnage, Makar Alexéiévitch tire à lui tout l’intérêt du livre : dans le voisinage d’un saint, quel prestige peut conserver une simple fille d’Ève ?