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21 août.

MADEMOISELLE ET CHÈRE AMIE VARVARA ALEXÉIEVNA !

Je sens que je suis coupable, je sens que j’ai des torts envers vous ; oui, et, à mon avis, il ne sert de rien, matotchka, que je sente tout cela, quoi que vous en disiez. Avant ma faute, je sentais déjà tout cela ; mais voilà, j’ai cédé au découragement, j’ai succombé tout en sachant que je faisais mal. Matotchka, je ne suis pas méchant ni cruel ; pour déchirer votre petit cœur, ma colombe, il faut être ni plus ni moins qu’un tigre altéré de sang ; or j’ai un cœur de brebis, et, comme vous le savez, mon naturel n’est pas sanguinaire ; par conséquent, mon petit ange, je ne suis nullement coupable de ma faute, pas plus que mon cœur et mes pensées ne le sont ; je ne sais donc pas ce qui est coupable. C’est une chose fort obscure, matotchka ! Vous m’avez envoyé trente kopeks d’argent et ensuite deux grivnas ; j’ai eu le cœur navré en considérant cet argent qui me venait d’une orpheline. Vous vous êtes brûlé la main, bientôt vous aurez faim, et vous m’écrivez d’acheter