Le long louchet, ou la courte faucille,
Entre mes mains ne me fait honte lors,
Ni ce lou velu qui m’abille,
Ni les ſouliers ſales & ors.
De la charue aucunefois, peut-eſtre,
Les mancherons moy-méme guiderai,
Et du foüet, ſonné en maiſtre,
Les iumens laſſes haſterai.
L’eur de ma main fera voir dans nos grãches,
Les purs fromens, iuſqu’aus tuiles taſsés,
Et, du dous reuenu des branches,
Nos celiers iuſqu’à l’arc preſsés.
Car deuot ſuis : & la dime, ſans faute,
De tous mes fruits noſtre curé reçoit :
Et n’eſt feſte baſſe ni haute,
Donc le iour chommé ne me ſoit.
Le bon patron de ce poure village,
Qui n’eſt qu’vn ſaint des plus groſſes façons,
Vn rude bois & lourd image,
Toutefois nous nous y paſſons,
Voit chacun an, auec maint feu de cire,
Tout ſon autel de mes bons fruits couuert,
Et du prime épi ie lui tire
Vn chapeau mi-iaune mi-vert.
Son guet auſsi (croiés peuple) me garde,
Et mon bétail ſi ſurement maintient,
Que nul larron ne ſ’i hazarde,
Et le lou même ſ’en abſtient.
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