Page:Doucet - Campagnards de la Noraye (d'après nature), 1918.djvu/37

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
— 36 —

voisin qui se donnait à son gendre, — à la fortune du pot — de retarder encore quelques années la donation de sa petite terre « d’en bas », vu que cette terre serait, bien sûr, une garantie utile. Et sa femme d’ajouter : — Oui, cette terre serait un joli petit « porte-respect ». Le mot a fait le tour de la paroisse.

L’un et l’autre étaient démonstratifs, à leur manière, mais sans bruit, dans l’expression de leurs sentiments, elle par de bons mots habiles, et lui, par des mots très simples et toujours polis.

Cet homme a été un des plus grands philosophes de ce monde : il ne s’est jamais fait de bile, ni dans la vie, et je pourrais dire ni dans la mort, prenant son temps pour vivre et prenant aussi son temps pour mourir ; passant 50 ans sur la petite terre qu’il avait lentement défrichée avec l’aide de sa femme, dociles l’un à l’autre, contents tous deux du matin au soir, du soleil du bon Dieu et de son tabac, contents l’un et l’autre du