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Page:Dourliac - Les apprentis de l'armurier, 1895.djvu/123

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les apprentis de l’armurier

Était-ce son peu d’émotion en retrouvant sa mère ?

Était-ce, sur ce visage vulgaire, l’absence complète d’un signe de race, d’une ressemblance de famille ?

Était-ce sa froideur, à elle, alors que le cœur de son fils battait près du sien, pour la première fois depuis tant d’années ?

Elle posa ses lèvres sur son front, faisant un effort pour évoquer la délicieuse sensation qu’elle se promettait un instant auparavant.

— Cher enfant ! tu sais que je suis ta mère, dit-elle tendrement.

— Oui, vous êtes madame Marguerite de Flandre, dame de Dampierre.

— Oui.

— Je suis bien content de vous voir, reprit-il avec une naïve franchise, et Gaultier aussi va être content !… il a dû vous plaire, mon Gaultier ; si bon, si beau, si brave ! Gageons que vous lui trouverez meilleure mine qu’à moi ? Quel élégant gentilhomme ce serait, n’est-ce pas ? Oh ! je n’en suis pas jaloux, au contraire…, et même si vous aviez pour lui une secrète préférence, cela ne m’étonnerait pas… Mais où donc est-il, le paresseux ?

— Hélas ! mon fils, préparez-vous à un grand chagrin, puisque vous aimez si fort votre ami. Lui aussi vous aime tendrement, jusqu’à donner sa liberté, sa vie pour vous…

— Quelle sottise a-t-il encore faite ? s’écria Guy très inquiet.

La noble dame lui raconta le dévouement du jeune écuyer se livrant pour son maître !

L’ex-apprenti écoutait, atterré.

— Et vous l’avez laissé commettre une pareille folie !

— Il fallait choisir entre vous deux !

— Et vous avez préféré… Par tous les Saints ! vous avez fait là un joli coup !!