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les apprentis de l’armurier

à l’ordre impérieux de son ancien camarade, était en train de se passer lui-même la corde au cou avec une mauvaise grâce fort compréhensible.

— Prie Dieu que notre sire Guy revienne bientôt, dit froidement Gaultier, en réponse à ses supplications ; car, j’en jure Dieu, si, au chant du coq, celui que tu as trahi comme Judas n’est pas de retour, tu subiras le supplice de Judas.

Poussé par une sorte d’inquiétude vague et de singulier pressentiment, Gaultier, qui logeait avec la dame de Dampierre à l’autre bout de l’hôtellerie, s’était rendu chez son ami au moment où il venait d’être entraîné par Harwelt et ses gens.

En voyant l’appartement vide, les meubles renversés, les couvertures arrachées, témoignant d’une agression brutale et d’une défense inutile, le jeune écuyer était demeuré atterré.

Un léger bruit l’avait tiré de sa torpeur.

Hugonet, sa honteuse besogne terminée, refermait doucement la porte, et, pieds nus, retenant son souffle, se préparait à regagner sa couche.

La main de fer de Gaultier s’abattit sur son épaule :

— Misérable traître ! qu’as-tu fait de mon frère ? gronda-t-il.

Le tourne-broche poussa un cri de terreur et se débattit vainement sous l’étreinte puissante de son ancien compagnon, plus faible et plus petit que lui cependant, mais dont la colère et l’indignation décuplait la force nerveuse.

— Répondras-tu, suppôt de l’enfer ? Répondras-tu ? répétait le jouvenceau exaspéré.

Hugonet n’avait garde et pour cause ! D’abord ses explications, ses excuses n’étaient pas d’une qualité irréprochable et avaient peu de chances d’être admises ; ensuite les doigts de